contes
www.farahdouibi.fr
LE BÂTISSEUR
ou Le Bâtisseur qui ne Savait Pas Dire Non
AVANT-PROPOS
Paratextes
Pour des personnes averties qui font le choix délibéré du sacrifice de soi pour autrui, celles-là connaissent toutes les conséquences d’un tel choix et sont prêtes à les assumer pleinement. Cependant, encore trop peu de personnes parviennent à distinguer le sacrifice de soi du don de soi.
Là où le don de soi suppose l’échange, le partage, véhicule de valeurs positives, du sacrifice de soi découle la négation même de notre être propre.
Pendant des années, j’ai fait sans le comprendre le sacrifice de moi pour autrui. Pire ! Je suis allée moi-même chercher autrui pour me proposer en sacrifice. « As-tu besoin d’aide ? » « Tu veux que je t’aide ? » « Je peux t’aider si tu veux. » De nombreuses années j’ai perdues et des personnes souvent intéressées j’ai attirées.
Le temps aidant, j’ai fini par entendre un conseil, puis une mise en garde, un avertissement ici et une prière par là. De belle personne en belle personne, j’ai pu construire en ce domaine un schéma de pensée sain à l’opposé du schéma tortueux que j’empruntais depuis toute petite.
Parmi toutes ces belles rencontres, il y eut Nita qui, un jour, me raconta une histoire :
« C’est l’histoire d’une maman lionne qui partait en chasse tous les jours pour nourrir ses petits. Chaque jour, après avoir chassé, elle mangeait sa part, puis apportait le reste à ses petits. Parfois, lorsque la chasse n’avait pas été assez prolifique, elle était seule à manger.
– Quel égoïsme !
– Bien. Je vais lui faire adopter un comportement humain, dit Nita : alors que la maman lionne part en chasse ce jour, elle n’obtient que peu de nourriture. Elle apporte d’abord son piètre gain à ses petits, qui, affamés, mangent tout.
Le lendemain, les proies se font encore plus rares et la maman lionne s’épuise pour trouver quelque gibier. Elle apporte cette maigre pitance à ses petits, ce jour encore. Et ce jour encore, elle ne mangera pas.
Le lendemain, devenue trop faible de n’avoir rien mangé, la maman lionne devient proie et périt sous les dents d’un prédateur. Ce jour-là, les petits ne mangeront pas. Les jours suivants non plus et bientôt, ils meurent aussi.
Même si l’amour que la maman lionne porte à ses petits et son mari la nourrit dans une certaine mesure, cet amour et toutes les meilleures intentions du monde ne peuvent remplir l’estomac. La nature étant bien faite, la maman lionne mange d’abord sa part, afin d’être assez forte pour continuer à chasser chaque jour et apporter ce qui peut l’être à ses petits. Si elle vient à manquer trop souvent de proies, certains petits pourront mourir, même tous ; cela arrive. Mais même dans ce cas, la maman lionne pourra toujours donner naissance à d’autres petits pour perpétuer le cycle de la vie. »
C’est à la lumière des deux schémas possibles, l’un toxique, l’autre sain, que j’ai pu identifier les mécanismes qui me maintenaient dans les cycles délétères où j’étais prisonnière. C’est en m’en émancipant définitivement que j’ai pu retrouver qui je suis vraiment, pourquoi je suis ici pour ensuite chercher les ressources nécessaires en moi pour reprendre mon chemin.
Si un jour j’ai la chance d’avoir un enfant, j’aimerais lui apprendre les belles valeurs que sont la générosité, la charité, la pitié, la compassion et parce que mon désir en tant que maman sera de protéger mon enfant, je lui apprendrai également la tempérance et la modération de ces valeurs, afin qu’il puisse se préserver des excès et des abus, qu’ils viennent des autres ou de lui-même.
Durant l’écriture de ce conte, d’autres valeurs se sont ajoutées à l’histoire, l’enrichissant considérablement. Trop. À un moment, alors que j’allais ajouter une énième partie, j’ai dû arrêter.
Voici donc mon premier conte, premier d’une longue série, je l’espère. Cette série se destine à présenter des schémas de pensée sains là où tant de personnes dans nos sociétés modernes souffrent de leur état. Mon but, ici, est de nous faire retrouver notre souveraineté spirituelle, car c’est de celle-ci que découlent toutes les autres.
J’espère de tout mon cœur que ces textes pourront aider ceux qui en ont besoin.